Une ribaude chez un baron

Invité

C'est à la fin de l'été que la jeune ribaude de Vendôme se présenta aux remparts de Chinon. Le vent commençait à peine à forcir, mais la chaleur était toujours accablante, en fin d'après-midi. La jeune femme était connue dans sa ville sous les noms de fougueuse, ou encore on la nommait familièrement l'accoucheuse.

Elle avait marché durant deux jours, quand une sieste sous un arbre s'était imposée. C'est alors qu'un malencontreux écureuil avait fouillé dans son baluchon et lui avait dérobé son unique miche de pain. A son réveil, la ribaude n'avait plus une miette à se mettre sous la dent...
Le bourreau, le croque-mort, le borgne, ces trois hommes qui ne font qu'un, lui avait bien aimablement conseillé de s'adresser en premier lieu, au sieur le baron de Khazad, dès son arrivée à Chinon.

Revenons à nos moutons. La jeune et belle jeune femme envoie donc son moineau postal, surnommé Cupidon, poster une lettre à l'inconnu Burin Khazad. Il revient tout aussitôt, alors que la jeune femme pénètre dans les faubourgs de Chinon. Quelques aimables échanges de lettres et enfin... C'est convenu ! La ribaude est conviée à dormir chez un baron.

Elle était donc là, debout devant les murs de l'imposant château, une chaînette entre les lèvres, et une petite clef qui y pendait, blanchie de farine. A la vérité, elle lui avait été remise chez un boulanger, où un valet de Khazad l'avait attendue. Ignorante des manières de se tenir devant les portes d'un château, ainsi seule et avec un baluchon sur l'épaule, elle haussa simplement le ton, les mains en porte-voix :

Hoé ! J'ai ici une lettre au sceau du baron Burin Khazad qui me convie à séjourner chez lui ! J'peux entrer ?

Le sergent des hommes d'arme du Château de Fouchault fut prévenu par un homme de garde de l'arrivée d'un visiteur, ou plutôt d'une visiteuse.

Sergent ! Sergent ! ... Y'a une femelle fort légèrement vêtue qui demande à voir le Baron.
S'rait possible que vous v'niez voir de quoi il en résulte, je crois que là ça me dépasse, j'arrive pas à m'concentrer pour lui parler ... De suite je garde les yeux sur ses formes féminines ...

Le sergent regarda son homme amusé, puis il s'habilla en vitesse, remettant son harnois et son casque tout en se précipitant vers la porte, renversant de ce fait son compagnon.

Un casque roule au dehors, suivit d'un bras qu'on l'on perçoit à peine. Il récupère son casque et regarde son sergent à l'action par le coin de la poterne Saint-Christophe.

Le sergent toussote et prend son souffle. Il arrive en vue de la damoiselle, pose sa large lame sur son épaule en la tenant par la garde de la main gauche, et mange une pomme qu'il a prit en sortant de sa main droite. Enfin il s'adresse à la visiteuse.

Bien le bonjour la donzelle.
Ici tu es au Château de Fouchault, la demeure de mon maître, la baron Burin_Khazad.

L'homme sculpte la jeune femme de haut en bas puis siffle légèrement d'admiration . Enfin il pose son regard sur le parchemin qu'elle tient à la main.

Fais donc voir cette lettre la donzelle. On verra si j'y reconnaît le sceau de mon maître, et alors, peut être, te laisserais-je entrer en ces murs.

Le sergent laissa tomber sa lourde épée qu'il planta dans une planche du pont-levis. Il enleva son casque et s'avança un peu vers la jeune femme, attendant ce qu'il avait demandé à l'instant.

Invité

Un homme au casque bien lustré, tenant une pomme à la main, s'avance vers la ribaude et se poste à quelques pas d'où elle se tient. Il croque alors sa pomme avec désinvolture, tout en l'observant de haut en bas...

La jeune femme fait un pas en avant, et relève subitement ses jupons, de façon méthodique. L'homme semble avaler de travers, il crache, puis tousse à s'en démolir les poumons.
La ribaude n'y prête pas attention et sort un bout de parchemin des replis du fin tissu.
Les jupons sont rabaissés, le sergent a terminé de se racler la gorge...

Hum hum... Donc... Cette lettre...

Elle s'avance encore d'un pas, tend la main vers la pomme et la fais sienne, tout en exhibant une lettre munie d'un sceau cassé en deux. Le sergent prend la lettre, la ribaude prend la pomme.

La voilà, lisez, c'est écrit de sa main.

Et pendant qu'il la parcourt des yeux, elle croque dans le fruit avec un léger tapotement du pied...

Le sergent ne sait plus où donner de la tête. Enfin il remarque que la donzelle tape du pied. Il reprend ses esprits et regarde avec attention la lettre et surtout son sceau. Après une lecture très approximative mais suffisante il replonge son regard dans celui de la belle ribaude et lui dit:

Et bien ma p'tite dame, c'est bien le sceau et l'écriture de mon suzerain.
Nous allons vous ouvrir les portes ... Mais ... vous ne voulez pas rester un peu avec nous avant peut être ?

Le sergent reste bouche baie devant le regard presque menaçant de la donzelle. Il détourne son regard du sien puis lui montre l'entrée du Château. Une ribaude chez un baron Noir

Euh ... C'est par là-bas damoiselle. Un homme va vous y accompagner à défaut que je le puisse ...
Le Baron doit être ici mais il est plutôt discret ces temps-ci je crois. Vous pouvez visiter je pense ... rien n'est contradictoire à ceci dans la lettre.

Le sergent admire le déhanché de la belle qui s'éloigne puis se rappel d'une chose et lui dis d'une voix puissante:

J’oubliais ! La maîtresse des lieux n'aime pas qu'on tourne autour de messire Burin, il serait fâcheux que vous deviez partir ... ... alors soyez comment dire ... sage. Je finis mon service à la tombée de la nuit d'ailleurs ...

Le sergent sourit alors à la belle gueuse tout en la regardant s'éloigner

Invité

A la tombée de la nuit ? Demande la ribaude, de dos, tout en s'avançant vers sa nouvelle demeure. Si je m'ennui ce soir, promis que j'viendrais faire un tour du côté du corps de garde...

Et, ne prenant pas la peine de se retourner, elle lance le reste de pomme derrière elle et disparaît dans la cour.

Le sergent reste debout, souriant béatement, un trognon de pomme sur la tête, les yeux dans le vague...